Comment écrire les traumas de l’enfance Jeanne, Jeanne, Jeanne d’Emmanuel Adely

Aime-moi, regarde-moi, fais-moi vivre sous ton regard, voilà la supplique que la voix narrative de Jeanne, Jeanne, Jeanne (2000) adresse à sa mère dans un monologue obsessionnel. Tirant plus avant l’écheveau de la quête amoureuse dans ce troisième roman, Adely a effectivement tissé un témoignage à la frontière du ressassement psychotique d’une force émotionnelle rare. De sa blessure affective initiale, le Je en mal d’attaches, d’amour et d’attachement, extrait les mots justes pour dire son trauma: l’abandon par sa mère biologique de l’enfant nouveau-né qu’il fut il y a 37 ans. C’est cette Jeanne inconnue, invisible, qu’il appelle et qu’il cherche,laissant à chaque page de ce récit de l’absence, du cri et du creux sa vulnérabilité, son irritabilité et sa mortifèreanxiété gagner un peu plus d’espace jusqu’à remplir tout son univers. Nous proposons une approche tripartite de ce roman qui mettra en relief l’écriture narrative singulière d’Adely, puis présentera la quête névrotique d’un fils confronté aux lacunes de sa généalogie et enfin soulignera les aspects psychanalytiques de cette approche romanesque des blessures affectives