Abstract :
Le Texte ne varietur ou texte-invariant, divulgué sous la forme d’une structure autonome, coexiste avec ses états antérieurs. La reconstitution des traces rédactionnelles permet d’appréhender le processus créateur qui préside à la naissance de l’oeuvre, en particulier les différentes phases de sa maturation progressive depuis l’atelier de travail du scripteur jusqu’au bon-à-tirer soumis à l’éditeur. L’essence du texte réside ainsi dans la succession de ses variations dont l’enchaînement projette l’image d’une dynamique créatrice interprétable sous le concept d’« avant-texte » ; entendu comme « l’ensemble constitué par les brouillons, les manuscrits de travail, les épreuves et les variantes d’écriture, vu sous l’angle de ce qui précède matériellement un ouvrage, quand celui-ci est traité comme un texte et peut faire système avec lui » (Bellemin 1972: 15). Hormis la critique génétique dont le fondement théorique repose sur l’étude des processus de création, la plupart des méthodes d’analyse du texte font encore l’impasse sur l’avant-texte, plus spécifiquement les manuscrits des corpus étudiés. Même s’il y a des travaux tendant à rapprocher la génétique des textes de la sociologie, de l’histoire, de l’informatique, de la critique textuelle (philologie), force est de noter que l’analyse des processus de création littéraire porte l’ambition d’un projet transdisciplinaire. De ce fait, elle s’est trouvé des soeurs jumelles parmi les disciplines des humanités avec lesquelles elle semble partager des filiations épistémologiques. Il en va notamment de la relation entre la critique génétique et la littérature comparée ; toutes deux feraient partie des « familles malheureuses de la critique littéraire » (Durante 2007: en ligne).